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Récits d'une blouse verte

2 octobre 2011

Portée sur ses épaules

Je regarde autour de moi et je reconnais certaines blouses connues dans le passé. Combien de temps ai-je été enfermée dans le noir ?? Je ne saurai le dire.....

Une blouse arrive réclamant le silence, avec difficulté je dois le reconnaitre, mais celle ci est différente. D'un blanc immaculé, elle reste debout et annonce quelques directives à toutes ces jeunes femmes un peu bavardes. (il faut avouer que ma propriétaire a plutot la parole facile). Par connaissance, j'en conclus que cette voix appartient à une infirmière et que sa présence est importante pour commencer sa journée.

Soudain un cahier tombe ouvert devant moi avec un bruit sourd, suivi de : "nous aimerions bien pouvoir faire les transmissions !!! nous avons juste un peu sommeil !!! Merci les filles !!!"  Magie ??? Pouvoir ??? Possession ??? Aucune idée, mais le flot de paroles incessantes s'estompent net pour faire place à un calme plat dans cette salle à l'éclairage pâle.

- "Mme X a passé une bonne nuit mais la perf, elle, n'est pas passée.... "

 Oui ça me revient ; Ce jargon m'est bien familié tout à coup.

- "Mr Z n'a pas chauffé et la sat était de 98 toute la nuit... "

Saturation, perfusion, constantes, tous ces mots ressurgissent du fond de ma mémoire de coton, et ma proprio les absorbe en griffonant quelques notes sur un bloc qu'elle dissimule dans une de mes poches. Je la sens curieuse, contente, interessée et ... bavarde ...  Mais l'aurai-je déjà dit ??

Puis quelques mots plus loin toutes les blouses se levent brusquement, partant vers tous les horizons.

-"Tu viens fumer ?"    -"Non je ne fume pas mais je viens quand meme"

Ma proprio ne fume pas visiblement mais elle suit cette jeune femme pour se sentir moins seule surement. C'est son premier jour de travail, ne l'oublions pas, il faut donc se fondre dans la masse... Technique purement féminine !

Mais moi je veux monter avec elle, je veux revoir les couloirs et les "anciens". Pourtant, subitement,  une angoisse me serre les boutons pressions. Depuis tout ce temps absente, qui est présent dans les chambres ? Qui est parti vers un autre monde ? Comment n'y ai-je pas pensé avant ? Personne ne communique avec une blouse de coton.....

 

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3 novembre 2010

Suspendue à un cintre,

Dans le noir total, je repense à ma journée d'hier. J'ai un propriétaire de nouveau, une devrais-je dire car c'est une femme. De part mon instinct je lui donne une petite quarantaine. (je n'ai aucun mérite, je l'ai entendue dire qu'Elle avait 4 bambins !!)
Nous avons fait connaissance en fin d'après midi, donc ce fut bref mais le contact  eu l'air de passer...

Bref me voilà suspendue à un cintre, je suis passée de l'état "pliée proprement sur une étagère" à "suspendue dans un casier". Mais ce nouvel état me plait assez, il sous-entend que je vais de nouveau être le témoin vivant de ce travail, celui des aide soignantes ou autres auxiliaires de vie.

Le silence règne...

Je regarde mon compagnon de cellule : un pantalon blanc, suspendu lui aussi, la tête en bas... Dans le fond je distingue un sac en osier avec à l'intérieur le nécessaire pour faire des toilettes correctement :
- des gants vinyles à usage unique et des gants en coton jetables aussi...
- Un tube de crème hydratante, des sprays, (c'est bien Elle a l'aire de prendre soin des personnes âgées à la peau rendue fragile par l'âge),
- un baume à lèvres et un gloss (ok Elle est coquette !!)
Et à coté, une paire de sabot blanc immaculé, collé comme deux frères siamois.
Au dessus de ma tête, sur l'étagère une boite de serviettes hygiéniques, je confirme c'est bien une femme qui m'a adoptée, et une déodorant Ushaïa, Elle fait donc attention à Elle et aux conséquences désastreuses des sels d'aluminium. Mes manches n'auront pas à subir une quelconque agression chimique !

Pendant que je fais ce petit inventaire, les premiers rayons du soleil pointent timidement à travers les "barreaux" du casier. La journée ne devrait pas tarder à commencer. Elle devrait, dans les quelques minutes qui suivent, arriver, me décrocher pour m'enfiler sur Elle.

Je ne me suis pas trompée, il doit être aux environs de 6h45 et au loin quelques commentaires purement féminins réveillent toutes mes compatriotes qui s'agitent sur leur cintre.

1 novembre 2010

Sortie du placard,

Je suis longtemps restée enfermée dans ce placard ; on m'a désinfectée, repassée et pliée. Sur une pile dans le noir, on m'a rangée avec mes compatriotes. C'est calme et j'attends qu'on m'offre à quelqu'un.
Ce jour arrive enfin, j'entends la porte qui s'ouvre.... ! Un rayon de lumière éclaire mon vert un peu passé. On me saisit  et on me tend à.... Elle !!
Je ne la connais pas... Je ne l'ai jamais vu... Elle parle vite et me serre contre Elle. Elle a l'air trés contente de me tenir dans ses bras et remercie la dame blonde qui vieille sur nous. Sur moi.
Moi ? Qui suis-je ?
Je suis une blouse verte,  et on me porte pour travailler. Je fais partie d'un uniforme. Mon acolyte est un pantalon blanc, lui et moi sommes inséparables !
Je sens à sa façon qu'Elle a de me tenir, qu'Elle est fière de m'avoir.
Sans attendre, Elle file dans le vestiaire, tout en ne perdant mot des recommandations de la dame blonde : "prends en soin, tu n'en as qu'une ! Change le nom qui est inscrit et note le tien !"  "Oui oui" crie t'Elle.
Elle me pose sur une chaise, ouvre son casier, se déshabille, et m'enfile en un seul geste précis. Clac clac clac les pressions ajustées, je suis pile à sa taille ! Nous sommes faites l'une pour l'autre. Son prénom inscrit désormais sur sa poitrine, Elle se regarde dans le miroir et sourit : c'est parfait !! Casier fermé, Elle sort.
Elle traverse le salon rapidement et monte directement dans son étage, un couloir qui dessert plusieurs chambres l'attende. A l'aise sur ses épaules, je regarde autour de moi, et me souviens de ce qui j'ai déjà vécu dans ces lieux.
Bonjour dit Elle à plusieurs personnes âgées. Je reconnais certains visages, quelques rides, quelques voix éraillées, oui on y est : je suis de retour dans la  maison de retraite. Mon travail a  bien repris !!!


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